Quart d'heure de délire à Torhout :
Iggy Pop a fait sauter les bouteilles
Il s'est passé un moment extraordinaire, samedi,
au cours de ce quinzième festival de Torhout, un
moment de folie collective, inédit, imprévisible.
Ayant livré ses classiques (Lust for life, Passan-
ger...
) l'increvable Iggy Pop entamait ses rappels.
Voilà trois quarts d'heure qu'il tenait la plaine
sous l'emprise de sa voix gutturale, de ses contor-
sions et de son regard reptilien...
Et puis, on ne sait pas trop
comment ça a démarré.
Mais, peu avant 18 h 30, les
bouteilles de plastiques (vides,
précisons-le) se sont mises à vo-
ler par dessus les têtes. Le virus
s'est répandu d'un coup sur l'en-
semble de la foule (60.000 per-
sonnes, marqué par la cha-
leur !) et il y a au soudain des
Coup de balai après la tornage Iggy : les bouteilles s'accu-
mulent au pied du podium.
centaines, des milliers de bou-
teilles bondissant dans le ciel
plus qu'ensoleillé du festival. Ef-
fet euphorisant instantané,
presque magique. Démolisseur
de micros, Iggy Pop, torse nu,
entamait un rageur I Wanna be
your dog
. Au bout de quelques
minutes, c'est vers le podium
que les projectiles ont été orien-
té et il a littéralement com-
mencé à pleuvoir des bouteilles
(mais aussi, des fringues, des
rouleaux de papier WC, des cha-
peaux, des ballonets), sur la
scène et le pied du podium. Un
bombardement inouï, aussi inof-
fensif que spectaculaire, que,
tout en continuant à chanter,
Iggy, qui en a pourtant vu
d'autres, observait avec un re-
gard héberlé. Pour entretenir
ce délire collectif, l'homme-
iguane comme on l'appelle, pro-
longeait son set de dix minutes,
shootant dans les bouteilles.
Faute de munition, le déversage
se ralentissait. Iggt se retirait,
sans doute fier, à 44 ans, d'avoir
encore semé la foire sur son pas-
sage. Dans le frontstage, entre
podium et public, le service d'or-
dre piétinait les détritus plasti-
fiés, (produisant de curieux
croassement) et entamait le
grand nettoyage du plateau...

Les Pixies font fort

Avant Iggy Pop et après la
très rasoir Bonnie Raitt, les
Pixies avaient donné le premier
grand concert de la journée.
Morceaux courts, terriblement
énergiques, livrés à un public
passionné. Avec son physique
de garçon-boucher, son éter-
nelle chemise à carreau, Black
Francis, l'anti-star, était dans
une forme vocales superbe. Kim
Deal, la bassisite au sourire din-
gue produisant à ses cotés des
choeurs délirants. De Planet of
Sound à Thames, une prestation
très compacte, d'une intelli-
gence remarquable. C'est que les
Iggy, déchaîné, a failli s'étrangler avec le fil du micro.
Paul Simon, très serein : " C'est pas à Torhout que je vais
m'énerver ".
Pixies contournent les clichés
rock'n rollien, ou dégraissent à
ce point leurs chansons qu'elles
en acquièrent une force brute
peu ordinaire.

Ceciiiliaaa..

Pour maintenir l'enthou-
siasme déclenché par Iggy Pop,
on pouvait craindre que les
rythmes afro-brésiliens ne fas-
sent pas le poids. Physique de
moinillon contemplatif, Paul Si-
mon avait beau débarquer avec
tam-tams et trompettes et pré-
senter le saxo de Michael
Brecker au public, il n'était pas
évident que le courant passe. Le
grand escalier, l'orchstre en
fond de scène et le choeur au
bout à gauche faisaient comme
un barrage à la foule. Pourtant,
après quelques extraits du ré-
cent Rhythm of the saints,
l'unanimité s'est fait autour du
classique Bridge over troubles
water.

On attendait une note, un
geste en direstion du public
pour danser avec les dix-sept
musiciens en majorité noirs.
Comme une vague, Graceland a
alors déferlé sur les rangées de
spectateurs ; le pari était gagné.
Sans jeux de lumières ou de ges-
ticulations débridées, Paul Si-
mon entama seul Cecilia, après
deux rappels. Comme quoi
même à 50 piges, les valeurs sû-
res peuvent encore séduire...

Xavier DISKEUVE
Olivier LAMBERT

Torses rouges, visages
pâles, soulier d'or

De Dave à Franky, en vrac et rapido, l'essentiel d'une kermesse
rock'n roll très calorifière, avec quelques piments en plus !

DAVE, pas le roucouleur hollandais périmé, l'autre, Stewart,
l'ex-Lennox boyfriend, a donné un beau concert avec ses
Spiritual Cowboys, hélas, sacrifiés en matinée... Barbiche et Gilet
noir, le sombre Dave en avait de toute façon marre des concerts
grand messe d'Eurythmics.

DEE-LITE, un groupe de boîte mis au grand air, accueilli par
des oranges. Intérêt limité, s'il n'y avait les accoutrements kitch
de la chanteuse Lady Miss kier, façon Barbarella ou Bottes de
cuir, et le collier de médor clouté du bassiste Bootsy Collins.

SURFAITS, les Z'happy mondays. chanteur pâle, blafard au
regard shooté, musiciens anémiques. Seule attraction, l'échalas
osseux arpentant en permanence la scène, maracas en main. Les
Sex Pustules des années 90 !

DIABLES ! un soulier d'or dans le public, le longiligne Franky
Vanderelst him self. J'aime la musique, nous a-t-il confié, Pixies,
Iggy Pop. Dommage que je suis trop vieux pour apprendre la
guitare. Non, non, je ne vais pas faire un 45 t...

BOUTONS JAUNES sur scène. On était loin de la soirée Rapp
vendredi aux Halles de Schaerbeek, sous le signe du bouton
blanc anti drogue. Sur scène, on allumait cigarette sur cigarette,
de la charmante Kim Deal à la barbante Bonnie Raitt en passant
par les Happy Mondays. Sur la pelouse, le jaune bariolait des
autocollants anti-SIDA; choisissez vos couleurs, et que le
meilleur gagne !

SUR LA PLAGE, on aurait pas vu plus de dos et de torsage nus.
Toutes les nuances y étaient, du blanc transparent au rouge
carmin, écarlate, éclaté en cloques brulées. bienheureux ceux
qui auront bronzé uniformément dans cette mer humaine où le
rouge vif des casquettes ne protégeait que les crânes. PLus
heureux encore ceux qui, le soir, n'auront pas attrapé un gros
rhume sous la pluie d'orage glacée.

DU GAZ DANS L'AIR ! Quant petit Paul Simon monte sur scène et
que le public regarde derrière, il pourrait croire qu'on ne l'a pas
vu et se fâcher tout rouge. Pas de panique, ce n'étaient que deux
mongolfières qui ont pris l'air de Torhout au rythme de You Call
me Al
. C'est une boîte de sauce bolognaise volante qui a le plus
amusé le chanteur; on a heureusement évité la crise de jalousie.

DE L'EAU DANS LE JAZZ ou Sting-à-la-houpe mal inspiré
dans des bretelles. Même concert que décrit dans notre édition du
29 juin. Des morceaux dilués dans d'interminables parties jazzy,
même les Roxanne, King of Pain et autres morceaux policés, le
tout sous les éclairs et averse, terme logiquement orageux
d'une journée de canicule.


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